• ÉCOLE NATIONALE SUPÉRIEURE D'ART DRAMATIQUE DE MONTPELLIER

JANVIER 2016 / CRÉATION DE NNN PAR LA PROMOTION 2016, SOUS LA DIRECTION DE GILDAS MILIN

JANVIER 2016 / CRÉATION DE NNN PAR LA PROMOTION 2016, SOUS LA DIRECTION DE GILDAS MILIN

JANVIER 2016 / CRÉATION DE NNN PAR LA PROMOTION 2016, SOUS LA DIRECTION DE GILDAS MILIN 458 600 ENSAD Montpellier

En décembre 2015 et janvier 2016, la promotion 2016 travaille sous la direction de Gildas Milin à la création de NNN.

« La fiction NNN (Ni égaux Ni frères Ni libres) décrit un protocole de finalisation d’élaboration génétique et de programmation de robots organiques, partant du modèle de la fiction de Karel Čapek RUR (Rossum’s Universal Robots, pièce écrite en 1920 dans laquelle apparaît pour la première fois le mot « robot »).
Dans NNN, pour le bon fonctionnement de ses robots organiques et de son entreprise extrêmement lucrative, l’Institut International de Recherche en Psychophysique doit s’assurer que les robots organiques qu’il a créés ne prennent à aucun moment conscience du fait qu’ils ne sont pas humains, sans quoi il se produit ce que les scientifiques de l’Institut appellent : « la faille ».
Le protocole revient donc à faire croire à ces robots qui seront bientôt mis sur le marché de l’art qu’ils sont des acteurs, des metteurs en scène, des artistes de la scène.
Ces robots-acteurs et metteurs en scène jouent, répètent, travaillent (comme par hasard) à une recréation de la pièce de Karel Čapec (décrivant elle-même une révolte des robots jusqu’à l’extermination complète de l’humanité).
Ces robots, au cours des répétitions, resteront-ils persuadés qu’ils sont humains ou, au contraire, prendront-ils conscience qu’ils sont des non-humains et organiseront-ils à leur tour une forme de révolte ? C’est le sujet de NNN.
Cette fiction fait écho à une question soulevée par le théâtre et par la littérature de science-fiction, d’Isaac Asimov à Donna Haraway : si une nouvelle forme de conscience subjective émergeait un jour de nos avancées technologiques, cette conscience, cette nouvelle forme du sujet ne devraient-elles pas avoir des droits au même titre que les humains ? La question se poserait donc, après la naissance des droits de l’homme, d’un droit pour les consciences.
Le projet agencera des approches textuelles, chorégraphiques et filmées (deux semaines de tournage ont déjà permis de réunir les éléments nécessaires à la partie « vidéo » du spectacle).
Ce sera aussi l’occasion pour les élèves de l’ENSAD de continuer à approfondir une façon d’aborder le travail de plateau avec une technique que j’appelle « la désynchronisation ».

DÉSYNCHRONISATION
Quelques réflexions sur les phénomènes de « dépersonnalisation relative » vécus par les interprètes au moment où ils jouent m’ont amené, entre autre, à me questionner sur un aspect étrange de la pratique de l’acteur : on demande bien souvent aux acteurs de tout faire en même temps, d’avoir conscience de leur corps, de celui des autres interprètes sur le plateau, d’avoir une conscience et une maîtrise de leur voix, d’avoir une bonne mémoire du texte, d’être créatifs, de développer un imaginaire, d’avoir conscience de l’espace, d’avoir un sens critique, analytique, etc. et tout ça, bien souvent dès les premiers moments de répétition.

Mais, si nos émissions de signes et de nos perceptions internes et externes s’orchestrent dans la vie de manière apparemment naturelle, rien n’est moins évident pour la pratique de l’interprète.

Comment développer des partitions complexes — vocales, corporelles —, savoir en même temps son texte de façon réflexe, produire du sens (au sens directionnel, non définitionnel), si on ne s’est pas laissé le temps d’explorer chacun de ces domaines séparés de la pratique de l’acteur pour y faire des découvertes quasi-impossibles à faire quand tous ces domaines sont abordés simultanément ?

à la manière de nos cerveaux qui perçoivent les couleurs, les sons, les odeurs, la mémoire, les goûts, les espaces, les idées, la musique, etc., de façon dissociée dans des aires neurales séparées avant de les resynchroniser en nous donnant la sensation de tout percevoir en même temps, j’ai commencé, dans le travail, à séparer les différents domaines de la pratique de l’acteur, pour y faire des découvertes qui, à mon sens, n’étaient possibles que parce que ces différents domaines n’étaient plus mélangés.

Cette approche revient à travailler, comme dans une pratique d’orchestre, en séparant, en isolant les partitions de chaque instrument, en les désynchronisant dans un premier temps avant de les rassembler, de les resynchroniser dans une polyphonie orchestrale, à ceci près qu’ici l’orchestre c’est l’acteur et qu’il ne s’agit donc pas de partitions mais de champs de compétences distincts de l’interprète.

Ainsi, quand on travaille l’espace, on ne fait que ça ; quand on travaille sur des questions relatives à l’imaginaire, on ne fait que ça ; même chose pour le texte, l’interprétation, la voix, etc. Chacun des travaux engagés dans ces domaines séparés est filmé et fait l’objet de sélections.

L’écriture du spectacle se fait en resynchronisant les différentes sélections faites dans chacun des domaines séparés.

Cette approche, que j’appelle « désynchronisation », qui transforme le metteur en scène en agenceur de signes et l’acteur en créateur de signes, est au cœur de mon travail avec les acteurs et les élèves acteurs.

Cette approche, dans une certaine mesure, permet de penser les sons au bord des images, des espaces au bord d’imaginaires, des corps au bord des voix, des mémoires au bord de l’interprétation, des incarnations au bord de distanciations. »

Gildas Milin

Présentations publiques :

4 X 11 sera présenté en juin 2016 pendant le festival Le Printemps des comédiens à Montpellier.

Les représentations auront lieu du mardi au vendredi (un spectacle par soir)
Le samedi : intégrale des 4 spectacles